Au Gabon, la date du scrutin présidentiel a été fixée à avril 2025 par les autorités de la Transition. En moins de deux ans, ce sera la troisième élection organisée par le pays, si l’on considère l’élection référendaire. Dans un contexte national marqué par des tensions de trésorerie, cette échéance électorale portera un coup dur aux finances publiques dont la gestion fait l’objet de vives critiques.
En août 2023, il avait fallu 100 milliards de francs CFA à l’Etat pour organiser les élections couplées. Cette cagnotte, c’était sans compter les dépenses effectuées hors circuit officiel. Quelques mois après cette échéance qui s’était soldée par un coup d’Etat des militaires, eu égard aux nombreuses irrégularités ayant entaché cette campagne politique, avait été organisé en avril 2024, le Dialogue national inclusif (DNI) qui pour sa part, avait coûté à l’Etat la somme de 5 milliards de francs CFA selon les chiffres officiels. Puis, s’en est suivie l’organisation en septembre 2024, du référendum. Coup de la facture, 27 milliards de francs CFA.
Huit mois après, le pays annonce officiellement l’organisation du scrutin présidentiel. Cette échéance se tiendra en avril 2025 en lieu et place de l’échéance d’août 2025 comme le prévoyait le chronogramme de la Transition. Cette élection intervient dans un contexte de difficultés multiformes, notamment financière, en connaissance de la mauvaise gouvernance qui affecte la gestion de l’Etat depuis plusieurs mois selon l’avis de nombreux observateurs.
Intervenant dans un contexte particulier marqué par des tensions politiques sournoises et une envie des autorités de la Transition de s’imposer comme les futures figures politiques du Gabon, il est fort à parier que les éléments du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) en tête desquels, le président de cette organisation, Gén. Brice Clotaire Oligui Nguema, mettront les bouchers-doubles pour convaincre le lectorat. Cette option, qui est assez visible, dessine une sollicitation accrue des finances, qu’elles soient publiques ou des sources privées. Partant de cette possibilité, la somme de 100 milliards de francs CFA, désormais arrêtée au Gabon comme la caution-garantie pour l’organisation d’une bonne élection pourrait être réévaluée au risque de stagner. Et pour cause, de nombreux défis, notamment politiques, auxquels les autorités de la Transition font face permettent de pronostiquer sur cette possibilité.
Si ce présage financier se confirme, cela fragiliserait lourdement l’équilibre financier de l’Etat, déjà perturbé par des choix d’investissements politiques et publics non stratégiques. Cette possibilité tient en effet son fondement des orientations des dépenses de ces derniers mois, avec l’organisation d’événements non bénéfiques pour le pays. En effet, l’élection d’avril 2025 sera le quatrième événement politique le plus coûteux organisé par l’Etat pour des résultats non globalement satisfaisants, puisque les critiques sur la légitimité des choix politiques et des réformes en cours persistent toujours. De plus, cet événement intervient dans un contexte de tensions de trésorerie et de critiques acerbes à l’égard des équilibres financiers du Gabon. Et pour cause, la Banque mondiale (BM), le Fonds monétaire international (FMI), les agences de notation et la classe politique gabonaise critiquent de manière tous azimuts, la gouvernance du pays, notamment sur les aspects de rigueur et d’orthodoxie budgétaire.
Sans une prise de conscience rapide, le Gabon pourrait subir un nouveau plan d’ajustement structurel. Ce, moins de dix ans après l’intervention du FMI.
Michael Moukouangui Moukala