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jeudi, 27 mars 2025

Développement communautaire : une étude scientifique fait l’autopsie de la mise en place des forêts communautaires en Afrique centrale

Intitulée « économie politique de la foresterie communautaire en Afrique centrale ; les populations locales sont-elles les principaux bénéficiaires ? », une étude conduite entre le Gabon, le Cameroun et la RDC par le Consortium SAILD-CIFOR-IRAF-APEM dans le cadre du programme de Recherche en écologie et Sciences sociales, en appui à la gestion des forêts en Afrique centrale (RSSAC) soutenue financièrement par l’Union européenne (UE) dresse un état des lieux de l’implémentation des forêts communautaires dans les trois pays.

Menée dans 9 provinces des trois pays cités sur une période de 18 mois, l’étude, présentée comme un travail scientifique postdoctorale, a permis de dresser le bilan des impacts de vingt ans de foresterie communautaire en Afrique centrale et d’analyser les mécanismes et processus qui ont empêché les populations rurales d’être les principaux bénéficiaires de cette démarche. Pour apprécier les évolutions de ce mécanisme social communautaire, 45 forêts communautaires, soit 15 par pays, ont été sélectionnées sur la base des critères spécifiques retenus par les scientifiques.

L’étude a en effet permis de quantifier le niveau de soutien des forêts communautaires, d’évaluer les impacts directs et indirects de la foresterie communautaire aux échelles villageoises, de comprendre et analyser les obstacles qui empêchent la mise en œuvrer de mécanisme, afin de dégager des options de solutions pour repenser le modèle de foresterie communautaire dans les pays cibles du projet d’étude.

Pour le Dr. Léon Nguimbi, Chef de département Economie rurale à l’Institut Agronomiques et forestière (IRAF) les résultats sont mitigés. « Nous sommes arrivées à une situation où les populations locales, lorsque les pouvoirs publics ont pris la décision de mettre en place les forêts communautaires, n’ont pas au préalable été formées. Et donc, les communautés se sont retrouvées avec un bébé entre les mains qu’elles ne savaient pas comment élevé du fait du manque de connaissances en gestion forestière mais également en gestion financière. Beaucoup d’argent a été engrangé mais les populations n’ayant pas la capacité financière de gérer cet argent, les dépenses sont allées dans tous les sens, générant dans certains cas des conflits au niveau des communautés », explique-t-il.

De plus en plus critiquée du fait d’une gestion assez décriée et au regard des soutiens multiformes reçus sans résultats concrets, les forêts communautaires sont, selon les conclusions d’un scientifique camerounais acteur du projet, « à la croisé des chemins, car d’après lui, lorsqu’on observe l’importance des appuis apportés au processus et des résultats que l’on voit sur le terrain, on est un peu inquiet ». Or, fait savoir le Professeur Christian Mikolo Yobo, Coordonnateur scientifique de recherches au Cenarest, « la foresterie communautaire est le principal outil destiné aux populations locales ». Ce mécanisme de développement communautaire permet de décentraliser la gestion des forêts au bénéfice des populations rurales. Pour le Professeur, il est important que les résultats de cette étude aillent dans le sens de pouvoir alimenter les discussions du nouveau Code forestier, notamment en ce qui concerne la gouvernance des forêts communautaires.

En effet, avec plus de 80 forêts communautaires en Convention définitive contre plus d’une trentaine en Convention provisoire et une quarantaine décisions de réservation, les forêts communautaires, qui ont été instituées par l’État au Gabon afin «d’impliquer les communautés à la gestion durable des forêts pour limiter les pressions diverses», ne sont pas à l’abri des critiques. Alors que la révision du Code forestier est en cours au niveau local, les scientifiques espèrent que les résultats de cette étude serviront spécifiquement de boussoles aux autorités gabonaises pour repenser le modèle de la foresterie communautaire afin de l’adapter aux besoins des communautés.

Pour apprécier le niveau du couvert forestier dans les forêts communautaires cibles, le Consortium SAILD-CIFOR-IRAF-APEM  a eu recours aux outils tel que le Global forest Watch (GFW) qui est un système interactif de surveillance et d’alerte des forêts en ligne et à l’Atlas forestier. Les deux plateformes se positionnent en effet comme d’excellent outils d’alertes sur le niveau de dégradation des forêts, permettant ainsi aux gens partout dans le monde d’avoir à des données fiables afin de mieux gérer et protéger les paysages forestiers. 

S’il en est besoin, cette étude vient conforter les travaux menés par le passé par des ONGs, d’autres scientifiques et des journalistes sur le mode de gestion des forêts communautaires et les tensions qu’elles génèrent. La foresterie communautaire se présente comme un bon modèle de décentralisation, surtout dans les pays tels que le Gabon, le Cameroun et la RDC où les populations durales sont parfois oubliées par l’Etat. Par constat des quelques modèles de réussite, ce mécanisme offre des opportunités de développement local. La seule condition, est que les populations rurales suivent la cadence des retombées souhaitées.

Michael Moukouangui Moukala

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