En élisant Ali Bongo Ondimba pour présider aux destinées de la nation, depuis août 2009, ils sont nombreux à s’être attendus à de très profonds changements, positifs pour être précis, dans la gestion de l’appareil de l’État.
Des perspectives qui, du fait de leur constance, auraient fait du Gabon une nation forte, résolument tournée vers un avenir radieux.
Mais au fil des ans, la désillusion est totale.
Les choses n’ont pas bougé d’un iota. Mieux, les institutions, que l’on attendait fortes et représentatives, se sont profondément entachées.
Pis, entre les promesses non tenues et les incessants rétropédalages sur de nombreuses et importantes réformes, c’est tout l’espoir d’un peuple qui a été littéralement vidé de sa substance.
Convenons-en, un état qui se respecte ne peut inlassablement virevolter entre annonces et rétropédalages. Lorsque la fréquence de ces faits est établie, c’est toute sa crédibilité qui s’en trouve compromise.
Pour circonscrire notre thèse, disons les choses telles qu’elles sont, évoquons des faits par soucis d’illustrations et de clarté.
L’on se rappelle encore de la très controversée nomination de Jean De Dieu Moukagni Iwangou, lequel l’avait purement et simplement déclinée, après que l’annonce avait été faite par le gouvernement, sur Gabon première, le service public.
Ce dernier, pour être cohérent et en adéquation avec sa décision, avait prétendu n’avoir jamais été consulté. Des révélations, l’on s’en souvient encore, qui avaient choqué l’opinion.
Outre cet exemple, nous pourrions aussi évoquer l’histoire de cette ancienne secrétaire particulière de Magloire Gambia. Le sommet de l’État avait par la suite fait un rétropédalage 12 heures après la nomination, là aussi évoquant une “erreur de casting”.
Sans être exhaustif, il y a aussi le cas Pierre Claver Maganga Moussavou, limogé de son fauteuil de vice-président de la République, sans que le décret actant son éviction ne lui ait été dûment notifié, comme l’exige pourtant la procédure d’usage.
Mieux, les motifs de limogeage, même si l’on peut sous-entendre qu’il s’agissait bien de la très scandaleuse affaire liée au kevazingo, ont été éludés.
La présidence de la République a entretenu le silence, laissant libre cours à l’interprétation dans l’Opinion.
Enfin, Libreville se souvient aussi, du fait du caractère récent de cette énième bourde, de la nomination de Liban Soleman par les autorités Rwandaises, alors même que ce dernier se trouvait dans l’exercice de ses fonctions diplomatiques en Arabie Saoudite.
Le feuilleton est loin de connaître son épilogue et de l’avis de nombreux observateurs, il y a quelque chose qui ne va pas au sommet de l’État.
Pour le cas très spécifique de Brice Laccruche Alihanga, il est évident, parceque telle a toujours été là manœuvre, lorsque l’absence de cohésion entre le Pouvoir central de l’État et un haut dignitaire est établie, toutes les faiblesses et autres cadavres du dernier cité sont littéralement exposés sur la place publique.
La juste problématique que l’on pourrait formuler à cet effet serait celle de savoir qui cela grandit-il. Et peut-être aussi, à qui cela profite-t-il?
Le faux et usage de faux tel que notifié à Me Ange Kevin Nzigou, le conseil de BLA, entache au plus haut point l’État gabonais. C’est toute la République qui s’en trouve compromise, et le chef de l’État lui-même aux premières loges.
Pour comprendre la gravité des actions délictuelles reprochées à l’ancien directeur de Cabinet d’Ali Bongo Ondimba, il est crucial de rappeler quelque peu l’historique des nominations ayant conduit ce compatriote au firmament.
Bien avant son passage à la présidence de la République, BLA a officié dans de nombreuses administrations sous l’identité aujourd’hui controversée, sans que personne ne s’est, à priori aperçu de rien.
Après nominations en conseil des ministres, le tout entériné par un communiqué officiel du gouvernement, Brice Laccruche Alihanga a tour à tour occupé des postes tels que Directeur général de la Compagnie de navigation nationale intérieure et internationale (CNNII) et directeur du Cabinet présidentiel.
La dernière nomination citée a fait de ce dernier la deuxième personnalité du pays. Une position d’autorité et de pouvoir.
Il est important de spécifier qu’en amont de toute nomination, surtout de ce type, avant entérination du chef de l’État, les dossiers préposés passent par le fil de toutes les Coordinations de renseignements du pays, lesquelles ont mission de produire au président de la République un rapport détaillé et positif, avant que ce dernier n’engage l’État gabonais, conformément à son pouvoir discrétionnaire.
Dans cette dynamique, un autre service de renseignements de premier ordre est appelé à jouer un rôle prépondérant.
Il s’agit de la très puissante DGDI, dit CEDOC, lequel service avait établi le passeport à BLA, sur la base des documents aujourd’hui jugés frauduleux.
Et que dire des services des passeports diplomatiques des Affaires étrangères, tenus d’une main de fer par l’inamovible, l’indéboulonnable “Frère lumière” Embiga?
Soit également dit au passage que le très respectable “frère lumière” n’établit jamais de passeports de ce type sans le quitus direct du président de la République.
Ce très proche de Pascaline Bongo ne s’exécute qu’à la demande des Bongo, et de personne d’autre.
Cela dit, au vu des éléments ici juxtaposés, si le faux et usage de faux demeure le grief retenu pour définitivement faire condamner BLA, c’est tout l’appareil administratif qu’il faudrait interpeller pour audition.
Si BLA, à ce niveau de responsabilité a bénéficié de documents administratifs gabonais sur la base du faux, c’est toute la crédibilité du passeport gabonais qui y est compromise, et avec lui la première institution du pays.
Le chef de l’État, pour avoir nommé un “faussaire” a des fonctions aussi prestigieuses et stratégiques que celle de directeur de Cabinet a donc été induit en erreur. C’est la seule hypothèse.
Ce serait donc sur la base de faux rapports, que le président gabonais se serait prononcé.
Ainsi, dans la perspective de sauver l’image du chef de l’État, qui est par ailleurs le garant des institutions, de leur fiabilité et de leur force, les comptempteurs de BLA gagneraient à réviser leur copie.
Un énième scandale pourrait à jamais faire du Gabon et de son président, la risée à travers le monde.
Stive Roméo Makanga